Ces “purs et durs” ambassadeurs de la sécurité
La particularité des véritables ambassadeurs de la sécurité “purs et durs”.
Après avoir travaillé sur quelques dizaines de projets, il se peut qu’il soit difficile d’oublier certaines personnes, même des années plus tard. Surtout parce qu’elles se sont avérées de grands défendeurs de la sécurité au travail, à l’encontre de toute pression de groupe.
Appelez-les “ambassadeurs”, “promoteurs”, “fortes têtes”, peu importe. Ce qui compte, c’est qu’ils foncent, c’est tout.
L’histoire de ces remarquables employés m’a toujours fasciné.
Je me souviens par exemple de Jürgen, chef de chantier dans l’une des plus grandes entreprises de construction. Un homme, un vrai. Un positif.
Un jour, Jürgen et moi bavardions autour d’une tasse de café. Rien d’officiel. Très vite, je lui ai posé la question pourquoi il était si fanatique quant à la sécurité au travail…
Dès le premier jour, Jürgen s’est avéré être le plus fanatique et le plus actif quant à notre programme sur la culture de sécurité durable.
Il n’a jamais raté une seule occasion pour mettre en place une série d’initiatives visant à améliorer la sécurité sur les sites qui relevaient de sa responsabilité. L’une initiative encore plus créative que l’autre. « D’abord la sécurité, ensuite la productivité » n’était pour lui pas un slogan vide de sens. Le plus remarquable dans l’histoire : ses sites étaient parmi les plus rentables et ses collaborateurs parmi les plus motivés du groupe.
Il m’a (littéralement) répondu :
“En fait j’ai tout appris par la pratique. J’ai commencé en bas de l’échelle comme bricoleur/maçon. J’ai travaillélongtemps pour une société de rénovation. Un jour, ma femme allait bientôt accoucher de Benjamin, j’étais en train de travailler sur la toiture d’une église à 45m d’altitude. Je n’étais pas attaché. Je pensais dans mon orgueil que rien ne pouvait m’arriver, ‘ça faisait des années que l’on travaille de la sorte’.
À un moment donné, j’ai glissé et je suis tombé. En une fraction de seconde, j’ai cru que ma vie était finie. Comme par miracle, je suis resté attaché à la gouttière à une hauteur de 30 mètres. Finalement, j’ai eu plus de peur que de mal”.
“A un autre moment dans ma carrière, j’étais contremaitre, nous allions tous les matins chercher les membres de l’équipe avec notre bus. Ce matin-là, nous avions été cherchés D.
Et ce que personne ne croyait possible arriva : peu après midi, en grimpant sur un bête échafaudage, D. trébuche sur la plateforme et tombe. Grièvement blessé, on l’a conduit à l’hôpital, où il a succombé à ses blessures le lendemain.
Vous ne voulez pas savoir ce que nous avons ressenti ce jour-là en rentrant chez nous. C’était horrible de devoir ramener son frigo box et ses outils chez lui. Je ne le souhaite à personne”.
Pendant de longues minutes, Jürgen regardait dans le vide. Comme s’il revivait à nouveau ces deux drames.
“Ces deux événements ont fondamentalement changé ma vision de la vie, ils ont surtout définitivement changé ma vision de la sécurité au travail.
Depuis lors, j’essaie tous les jours de sensibiliser mon entourage à la sécurité au travail. Après tout, nous n’avons qu’une seule vie”.
En rentrant chez moi, je me suis posé la question s’il faut d’abord avoir soi-même vécu un accident (presque) mortel traumatisant avant d’être convaincu de l’idée de la nécessité d’adapter à tout moment son comportement aux risques professionnels qui rodent dans chaque recoin. J’ose espérer que non!
Anne-Marie Vanhooren
Consultant Senior en culture de la sécurité – formateur et coach (StepStones for Safety® )